Quelle bizarrerie que le catholicisme !

Cette religion nous eût donné l’altruisme,

La bonté, la grandeur, l’amour, la charité !

La poussière encrassant son Dieu a bien chanté :

Une vieille hier soir qui traversait la rue

Me contait des chansons de sa voix convaincue ;

Cela semblait joli mais l’air était trop vieux :

« _ Dieu t’aime, cher Christophe, et tu vois d’autres dieux.

Tu vois l’argent, tu vois l’amour, tu vois les filles.

Tu vois, tu veux, tu prends, mais jamais tu ne brilles

Des feux incandescents du véritable Amour.

Ah ! que c’est malheureux. » Je parlais à mon tour.

« _ Madame, votre Dieu, votre amour, votre offrande,

Votre cœur, votre don, je vous les recommande,

Mais j’en veux point pour moi. » Oyez ce qu’elle dit :

« _ Vois-tu, j’espère en Dieu car son cœur resplendit ;

J’ai connu le Seigneur et ses œuvres parfaites ;

Satan de son côté subit mille défaites,

Car il refuse Dieu, reclus dans son orgueil.

Dieu m’a tant soutenu lors de mon triste deuil

(J’ai perdu mon mari), que je chante et je prie

Tous les jours. » Je réponds que l’Église est pourrie

Par sa triste vieillesse, après quoi je soutiens

Que le pape Benoît trompe tous les chrétiens.

« _ Mais non, mon cher monsieur, Benoît Seize nous aime,

Il nous montre la Voie et l’emprunte lui-même,

Il est le berger qui conduit ses brebis,

Sa foi jaillit pour nous tel l’éclat du rubis ;

De la maison de Pierre illustre majordome,

Il guide en bon pasteur la belle foi de l’Homme.

Christophe, écoutez Dieu et vous irez au Ciel ;

La vie vous semblera plus douce que le miel. »

Je ne sus que répondre à tant de poésie.

Sa voix grinçante était pleine de frénésie.

Je te vois sous les traits d’un sinistre vieillard,

Église millénaire, un sombre corbillard

Transporte d’un pas lent ton immense cadavre,

Sous mes yeux on détruit la piété de ton havre :

Rome tombe en ruine et dans le sombre oubli.

Vois-tu, je ne puis croire au mystère accompli.

Hélas ! avant-hier j’ai trouvé l’agréable.

Je vis au soir tombant la femme remarquable :

Son visage brûlait du feu de la beauté,

Sa voix resplendissait d’un éclat de bonté,

Son corps était sculpté telle une fine rune,

Ses cheveux clairs luisaient sous les yeux de la Lune.

Là, je la saluai, la fixant de mes yeux ;

Son regard s’enfuyait : il était amoureux.

Une femme de plus au rang de mes conquêtes

Se présentait à moi ; ce seraient mille fêtes.

Ô joyau ! ô rubis ! ô saphir ! ô diamant !

Je rêvais, je brûlais, je voulais être amant,

Posséder pour moi seul cette pierre précieuse,

Emmener cette femme à l’ombre lumineuse.

Je lui parlais alors : je dis mille mots doux,

La priant de m’aimer, suppliant à genoux.

« _ Monsieur, que dites-vous ? M’aimer sans me connaître ?

A vos mots je comprends que vous voulez mon être ;

Le désir est tout vous mais mon corps est tout moi.

Pour ma religion le plaisir n’est pas roi,

Il est prince. _ Pour moi, vous avez tort, madame, »

Reprenais-je instamment. « _ Vendriez-vous votre âme

A culte de l’ego ? me répondit-elle alors.

Mon corps n’est pas à vendre, et ce n’est au dehors

De se servir de lui ! Ô péché de luxure,

Comme l’homme a souffert de ta sombre morsure ! »

Las ! elle m’humiliait. Je la laissais partir.

Ma confiance venait encor de me mentir :

Elle m’avait parlé d’une proche victoire

Et j’avais échoué. Pourtant je ne puis croire.

Dieu ne peut exister, pas plus que ce Satan.

Je ne comprends pas ceux qui ont la foi d’antan,

Je n’aperçois en eux que la sombre vieillesse

Des livres et des mots, que la noire détresse

Du doute qui les prend parfois pour plusieurs jours.

De ces gens puis-je voir enfin d’autres atours ?

Avant le jour d’avant j’ai rencontré un homme

Qui semblait un pamphlet à lui tout seul. Pour Rome,

Il faisait tout le mal qu’on pense des chrétiens.

« _ Je donne tout à Dieu pour de plus nobles biens,

Me dit-il ; mon rocher, mon bouclier, ma force,

C’est ma foi catholique. Elle détruit l’écorce

Qui enserre l’humain dans son sinistre orgueil. »

Aujourd’hui, qui verrait ces mots sous un bon œil ?

J’écoute fort peu ceux qui disent que Dieu m’aime,

Car nulle vérité ne sera théorème.

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