On marche lentement vers le sombre taudis
De ce chef que le monde admirait tant naguère,
Dont chaque journaliste avait quêté le dis
Tandis que Blanc et Rouge entretenaient la guerre.
Dans les bras de sa femme, endormi, le guerrier
N'entend point les pas sourds des renégats, des reîtres ;
Ils viennent pour que nul ne les puisse injurier
Dans l'ombre d'une nuit qui convient mieux aux traîtres.
Les Hunkpapas, si fiers, si valeureux soldats,
Se sont hélas perdus dans la Danse chimère ;
Mais on redoute encor les derniers candidats
Au conflit dont l'on sait la saveur trop amère.
Bison Assis - c'est lui qu'on veut - reste un grand chef,
Un maître, un brave, un homme, à jamais dans l'Histoire ;
Il a vaincu les Blancs et défendu son fief,
Sur la Little Bighorn tenu son territoire.
L'Amérique revoit ses soldats apeurés,
Ce Peau-Rouge qui vint, fougueux, lui tenir tête ;
Face à la fourberie et tant de coups fourrés,
Il comprit l'âme noire et l'esprit de conquête
De l'homme Blanc. Leurs chefs n'obtinrent de sa main
Ni l'or de ses Black Hills ni même signature ;
On vêtit Cheval Fou du pourpre et du carmin,
En un jour que l'Indien dit de triste nature,
Mais lui reste encor là parmi ses grands guerriers.
Il dort quand on le prend et déjà le réveille :
Menacé par le feu de ces Blancs armuriers
Dont l'air sombre et mauvais d'obéir lui conseille,
Attristé par ces yeux des Indiens renégats,
Il suit la troupe et sort de sa pauvre masure,
Mais les environs ont entendu les légats
Des Blancs prendre leur chef sans la moindre mesure.
Les jurons pleuvant, là, dans ce matin d'hiver ;
Une foule se presse et insulte les traîtres ;
Son chef est prisonnier de leur main et du fer
Qui l'attend sûrement comme un lieu sans fenêtres !
Bison Assis avance avec les policiers.
Il voit alors, plus loin, un ami en colère
Conspuer ses gardiens et leurs officiers,
Armé du vieux mousquet d'une menace claire.
Au chef mal réveillé on désigne un fourgon.
Il n'en faudra pas plus afin qu'il se débatte :
Il veut fuir le cachot de ce Blanc harpagon,
Mais un homme fait feu et lui brise la rate,
Un autre, pour tuer, vise en plein dans le cœur.
Et bientôt le chaos recouvre le cadavre
De celui qui fut craint par son propre vainqueur ;
La confusion règne, et l'on tue, et l'on navre ;
Les coups de feu, brutaux ; la vengeance, surtout :
On compte près de dix morts et ressent tant de haine !
Tout ce sang épandu qui pleure de partout
Rappelle à qui veut bien sa souffrance et sa peine.
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